Kitobni o'qish: «Le Piège Zéro»
L E P I È G E Z E R O
(UN THRILLER D’ESPIONNAGE DE L’AGENT ZÉRO—Volume 4)
J A C K M A R S
Jack Mars
Jack Mars est actuellement l’auteur best-seller aux USA de la série de thrillers LUKE STONE, qui contient sept volumes. Il a également écrit la nouvelle série préquel L’ENTRAÎNEMENT DE LUKE STONE, ainsi que la série de thrillers d’espionnage L’AGENT ZÉRO.
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LIVRES DE JACK MARS
SÉRIE DE THRILLERS LUKE STONE
TOUS LES MOYENS NÉCESSAIRES (Volume #1)
PRESTATION DE SERMENT (Volume #2)
SALLE DE CRISE (Volume #3)
L’ENTRAÎNEMENT DE LUKE STONE
CIBLE PRINCIPALE (Tome #1)
DIRECTIVE PRINCIPALE (Tome #2)
MENACE PRINCIPALE (Tome #3)
UN THRILLER D’ESPIONNAGE DE L’AGENT ZÉRO
L’AGENT ZÉRO (Volume #1)
LA CIBLE ZÉRO (Volume #2)
LA TRAQUE ZÉRO (Volume #3)
LE PIÈGE ZÉRO (Volume #4)
LE FICHIER ZÉRO (Volume #5)
LE SOUVENIR ZÉRO (Volume #6)
Résumé de L’Agent Zéro - Volume 3 (fiche récapitulative)
Quand ses filles sont kidnappées par une ombre de son passé, l’Agent Zéro doit tout mettre en œuvre pour les retrouver… même si cela implique de défier les ordres directs de la CIA et d’être désavoué par son gouvernement.
L’Agent Zéro : Même s’il a réussi à tuer l’assassin Rais et à sauver ses filles aux prises avec des trafiquants d’êtres humains, il a été désavoué par la CIA et, aux dernières nouvelles, a été escorté par trois agents vers un destin inconnu.
Maya et Sara Lawson : À la suite de la terrible épreuve qu’elles ont vécu en Europe de l’Est et après leur sauvetage par leur père, les filles adolescentes de l’Agent Zéro sont très éprouvées physiquement et moralement. Bien qu’elles soient impressionnées par la détermination dont il a fait preuve pour les retrouver, elles réalisent à présent qu’il est bien plus que ce qu’il prétend être.
Kate Lawson : Durant son combat final avec Rais, l’Agent Zéro se souvient que sa femme n’est pas morte de cause naturelle, mais qu’elle a été assassinée avec un poison mortel. Les derniers mots de Rais accusent la CIA de ce crime.
L’Agent Alan Reidigger : Dans une lettre qu’il a écrite à Zéro avant sa mort, Reidigger divulgue le nom du neurologue suisse qui a installé le suppresseur de mémoire dans la tête de Zéro. Il est donc sa meilleure chance de retrouver un jour tous ses souvenirs.
L’Agent Maria Johansson : Maria a révélé qu’elle travaillait dans deux camps… non seulement pour la CIA mais également pour le FIS ukrainien, même si elle affirme manipuler les deux dans l’espoir de percer à jour un complot qui menace d’entraîner une guerre imminente.
L’Agent John Watson : Quand la CIA découvre qu’il aide l’Agent Zéro à retrouver ses filles, Watson est arrêté, tout comme Maria Johansson.
L’Agent Todd Strickland : Jeune agent de la CIA et ancien Ranger de l’armée, Strickland est au départ envoyé pour arrêter l’Agent Zéro. Mais il finit par l’aider à retrouver ses filles, créant une étrange amitié à la suite de leur affrontement.
Le Directeur Adjoint Shawn Cartwright : On ne sait toujours pas vraiment de quel côté il est, si tant est qu’il y en ait un. Cartwright a aidé Zéro indirectement, mais l’a également désavoué durant sa quête sanglante en Europe de l’Est. Zéro pense qu’il s’agit simplement d’un opportuniste qui se contente d’avancer chacun de ses pions du côté qui l’arrange.
Contenu
PROLOGUE
CHAPITRE UN
CHAPITRE DEUX
CHAPITRE TROIS
CHAPITRE QUATRE
CHAPITRE CINQ
CHAPITRE SIX
CHAPITRE SEPT
CHAPITRE HUIT
CHAPITRE NEUF
CHAPITRE DIX
CHAPITRE ONZE
CHAPITRE DOUZE
CHAPITRE TREIZE
CHAPITRE QUATORZE
CHAPITRE QUINZE
CHAPITRE SEIZE
CHAPITRE DIX-SEPT
CHAPITRE DIX-HUIT
CHAPITRE DIX-NEUF
CHAPITRE VINGT
CHAPITRE VINGT-ET-UN
CHAPITRE VINGT-DEUX
CHAPITRE VINGT-TROIS
CHAPITRE VINGT-QUATRE
CHAPITRE VINGT-CINQ
CHAPITRE VINGT-SIX
CHAPITRE VINGT-SEPT
CHAPITRE VINGT-HUIT
CHAPITRE VINGT-NEUF
CHAPITRE TRENTE
CHAPITRE TRENTE-ET-UN
CHAPITRE TRENTE-DEUX
CHAPITRE TRENTE-TROIS
CHAPITRE TRENTE-QUATRE
CHAPITRE TRENTE-CINQ
CHAPITRE TRENTE-SIX
CHAPITRE TRENTE-SEPT
CHAPITRE TRENTE-HUIT
CHAPITRE TRENTE-NEUF
CHAPITRE QUARANTE
CHAPITRE QUARANTE-ET-UN
CHAPITRE QUARANTE-DEUX
CHAPITRE QUARANTE -TROIS
CHAPITRE QUARANTE-QUATRE
CHAPITRE QUARANTE-CINQ
CHAPITRE QUARANTE-SIX
PROLOGUE
Reid Lawson était épuisé, inquiet, et il avait mal partout.
Mais, par-dessus tout, il était perdu.
Moins de vingt-quatre heures auparavant, il avait réussi à sauver ses deux filles adolescentes aux prises avec des trafiquants slovaques. Pour cela, il avait dû stopper deux trains de marchandises, détruire involontairement un prototype d’hélicoptère extrêmement cher, tuer dix-huit personnes et en blesser sévèrement plus d’une douzaine.
C’était bien dix-huit d’ailleurs ? Il ne se souvenait plus du nombre exact.
À présent, il se retrouvait menotté à une table en acier, dans une petite cellule sans fenêtre, attendant de savoir à quelle sauce il allait être mangé.
La CIA l’avait prévenu. Les directeurs adjoints lui avaient bien dit ce qui se passerait s’il défiait leurs ordres et partait seul en croisade. Ils avaient voulu à tout prix éviter un autre carnage, comme celui qui était survenu deux ans plus tôt. Et ce qu’ils avaient qualifié de “carnage” était une échappée violente et sanglante à travers l’Europe et le Moyen Orient. Cette fois, elle avait eu lieu en Europe de l’Est : Croatie, Slovaquie et Pologne.
Ils l’avaient prévenu, et même menacé, de ce qui allait lui arriver. Mais Reid n’avait envisagé aucune autre solution. Il s’agissait de ses filles chéries. Maintenant, elles étaient en sécurité et Reid s’était résigné à accepter le sort qui lui serait réservé.
En plus de sa course effrénée de ces derniers jours et du manque de sommeil, on lui avait donné des analgésiques après avoir soigné ses plaies. Il avait hérité d’une blessure au couteau peu profonde à l’abdomen lors de son combat avec Rais, ainsi que de nombreuses contusions importantes, de coupures et d’écorchures superficielles, d’une entaille au biceps là où une balle l’avait frôlé et d’une légère commotion cérébrale. Rien d’assez sérieux pour l’empêcher d’être incarcéré.
On ne lui avait pas donné de destination. On ne lui avait rien dit du tout, tandis que trois agents de la CIA qu’il ne reconnaissait pas l’escortaient en silence de l’hôpital en Pologne jusqu’à un avion qui l’attendait sur une piste de décollage. Toutefois, il avait été quelque peu étonné d’atterrir à l’aéroport international de Dulles, en Virginie, et non dans un site secret de la CIA comme Enfer Six au Maroc.
Une voiture de police l’avait conduit de l’aéroport jusqu’au QG de l’agence, le Centre du Renseignement George Bush à Langley, en Virginie. Une fois là-bas, il avait été jeté dans une cellule aux parois d’acier qui se trouvait dans un sous-sol et menotté à une table fixée au sol… tout ceci sans la moindre explication de la part de qui que ce soit.
Reid n’aimait pas l’effet causé par les analgésiques : son esprit n’était pas totalement en alerte. Mais il ne pouvait pas dormir, pas encore, et certainement pas dans cette position inconfortable à la table en acier, avec la chaîne des menottes passée dans une boucle en métal et serrée autour de ses poignets.
Cela devait faire quarante-cinq minutes qu’il était assis dans cette pièce, à se demander ce qui pouvait bien se tramer et pourquoi on ne l’avait pas encore jeté dans un trou, quand la porte s’ouvrit finalement.
Reid se leva immédiatement, se redressant du mieux possible en étant menotté à la table. “Comment vont mes filles ?” se hâta-t-il de demander.
“Elles vont bien,” répondit le Directeur Adjoint Shawn Cartwright. “Rasseyez-vous.” Cartwright était le patron de Reid… ou plutôt l’ancien patron de l’Agent Zéro, jusqu’à ce que Reid soit désavoué pour avoir désobéi en partant lui-même à la recherche de ses filles. À la mi-quarantaine, Cartwright était relativement jeune pour un directeur de la CIA, même si ses épais cheveux bruns avaient commencé à grisonner par endroits. Ce n’était sûrement qu’une coïncidence, mais ça avait commencé au moment où Kent Steele était revenu d’entre les morts.
Reid se rassit lentement, tandis que Cartwright prenait une chaise pour s’installer face à lui en se râclant la gorge. “L’Agent Strickland est resté avec vos filles jusqu’à ce que Sara puisse sortir de l’hôpital,” expliqua le directeur. “Ils sont tous les trois dans un avion pour rentrer, à l’heure où nous parlons.”
Reid poussa un léger soupir de soulagement, très léger sachant que la sentence allait désormais tomber pour lui.
La porte se rouvrit et la colère monta spontanément dans la poitrine de Reid, alors que la Directrice Adjointe Ashleigh Riker pénétrait dans la petite pièce, vêtue d’une jupe crayon grise et d’un blazer assorti. Riker était à la tête du Groupe des Opérations Spéciales, une faction de la Division des Activités Spéciales de Cartwright qui gérait les opérations internationales sous couverture.
“Qu’est-ce qu’elle fait ici ?” demanda Reid en la pointant du doigt. Son ton était tout sauf amical. Pour lui, Riker était indigne de confiance.
Elle prit un siège à côté de Cartwright en souriant chaleureusement. “J’ai, M. Steele, le réel plaisir de vous indiquer où vous allez vous rendre maintenant.”
Un nœud d’angoisse se forma dans son estomac. Bien sûr, Riker était enchantée de lui infliger sa punition. Son mépris pour l’Agent Zéro et sa façon de faire n’étaient pas un secret. Reid dut se rappeler que ses filles étaient en sécurité et qu’il savait à quoi s’attendre.
Mais ça ne rendait pas les choses plus faciles pour autant. “Ok,” dit-il calmement. “Alors, dites-moi, où est-ce que je vais aller ?”
“Chez vous,” répondit simplement Riker.
Le regard de Reid passa de Riker à Cartwright avant de se poser à nouveau sur elle, pas sûr d’avoir bien entendu. “Je vous demande pardon ?”
“Chez vous. Vous rentrez à la maison, Kent.” Elle poussa quelque chose vers lui sur la table. Une petite clé argentée glissa sur la surface polie jusqu’à portée de ses mains.
C’était la clé des menottes, mais il ne s’en empara pas. “Pourquoi ?”
“Je suis incapable de vous le dire,” dit Riker en haussant les épaules. “La décision vient de plus haut.”
Reid n’en revenait pas. Il était certes évidemment soulagé d’apprendre qu’on n’allait pas le jeter dans un trou misérable comme E-6, mais quelque chose ne tournait pas rond selon lui. Ils l’avaient menacé, désavoué, et on avait même envoyé deux agents de terrain à ses trousses… juste pour le relâcher ensuite ? Pourquoi ?
Les analgésiques qu’on lui avait donnés altéraient son processus de pensée. Son cerveau était incapable de traiter les données qu’il entendait. “Je ne comprends pas…”
“Cela fait cinq jours que vous êtes parti,” le coupa Cartwright. “Vous avez mené des interviews et fait des recherches pour un manuel d’histoire que vous écrivez. Nous avons les noms et coordonnées de plusieurs personnes qui peuvent corroborer cette histoire.”
“L’homme qui a commis ces atrocités en Europe de l’Est a été intercepté par l’Agent Strickland à Grodkow,” dit Riker. “Il s’avère que c’était un expatrié russe se faisant passer pour un américain afin de tenter de causer un conflit international entre nous et les pays du bloc de l’est. Il a voulu ouvrir le feu sur un agent de la CIA et a été abattu.”
Reid cligna des yeux sous le flux de ces fausses informations. Il savait ce que ça voulait dire : ils lui créaient une histoire de couverture, la même qui serait diffusée aux gouvernements et aux forces de l’ordre du monde entier.
Mais ça ne pouvait pas être aussi simple. Il y avait quelque chose de caché là-dessous… à commencer par le sourire bizarre de Riker. “J’ai été désavoué,” dit-il. “J’ai été menacé. J’ai été ignoré. Je pense que je mérite un peu plus d’explications.”
“Agent Zéro…” commença Riker. Puis, elle se mit à rire légèrement. “Désolé, les habitudes sont tenaces. Vous n’êtes plus agent maintenant. Kent, ce n’est pas de notre ressort. Comme je vous l’ai dit, ça vient de plus haut. Mais la vérité, si on prend les choses dans leur globalité et non une par une, c’est que vous avez éliminé un réseau international de trafic d’êtres humains sur lequel travaillaient la CIA et Interpol depuis six ans déjà.”
“Vous avez tué Rais et, probablement, les derniers vestiges d’Amon avec lui,” ajouta Cartwright.
“Oui, vous avez tué des gens,” poursuivit Riker. “Mais c’étaient tous des criminels notoires, parmi les pires du pire : meurtriers, violeurs, pédophiles. Même si ça m’ennuie beaucoup de l’admettre, je suis d’accord sur le fait que vous avez fait plus de bien que de mal dans cette affaire.”
Reid acquiesça lentement… pas parce qu’il acceptait cette logique, mais parce qu’il réalisait que la meilleure chose à faire en ce moment était de ne pas argumenter, d’accepter qu’on lui pardonne et de chercher à comprendre plus tard.
Pourtant, il avait encore des questions. “Qu’est-ce que vous voulez dire quand vous dites que je ne suis plus un agent ?”
Riker et Cartwright échangèrent un regard. “Vous allez être transféré,” lui dit Cartwright. “Si vous acceptez le poste, bien sûr.”
“La Division des Ressources Nationales,” ajouta Riker, “est l’aile domestique de la CIA. Elle fait bien partie de l’agence, mais ne comporte aucun travail de terrain. Vous n’aurez plus jamais à quitter le pays, ni vos filles. Vous recruterez des ressources. Gèrerez les debriefs. Rencontrerez des diplomates.”
“Pourquoi ?” demanda Reid.
“Pour faire simple, nous ne voulons pas vous perdre,” lui indiqua Cartwright. “Nous préférons vous avoir avec nous à un autre poste que de ne pas vous avoir du tout.”
“Qu’en est-il pour l’Agent Watson ?” demanda Reid. Watson l’avait aidé à retrouver ses filles, avait réuni tout l’équipement nécessaire pour Reid et l’avait fait sortir du pays quand il en avait eu besoin. À la suite de quoi, Watson s’était fait griller et avait été arrêté à cause de ça.
“Watson est en arrêt maladie pour huit semaines à cause de son épaule,” dit Riker. “J’imagine qu’il sera de retour dès qu’il sera totalement guéri.”
Reid leva un sourcil. “Et Maria ?” Elle l’avait aidé, elle aussi, même quand elle avait eu pour ordre de la CIA d’appréhender l’Agent Zéro.
“Johansson est en congé,” dit Cartwright. “Elle prend quelques jours de repos avant sa nouvelle mission. Mais elle retournera bientôt sur le terrain.”
Reid dut se retenir de ne pas secouer la tête d’un air sceptique. Quelque chose était clairement bizarre… et pas seulement qu’on lui pardonne à lui, mais aussi à tout ceux qui avaient été associés à son dernier carnage en date. Toutefois, il savait aussi d’instinct que ce n’était pas l’endroit, ni le moment, de contester le fait de rentrer chez lui.
Il aurait le temps de décortiquer tout ça plus tard, quand son cerveau ne serait plus altéré par le manque de sommeil et les analgésiques.
“Alors… c’est tout ?” demanda-t-il. “Je suis libre de partir ?”
“Oui, vous êtes libre.” Riker sourit à nouveau. Il n’aimait pas du tout l’expression sur son visage.
Cartwright regarda sa montre. “Vos filles devraient arriver à Dulles dans environ… deux heures à peu près. Il y a une voiture qui vous attend si vous voulez. Vous pouvez aller vous laver, vous changer et vous rendre sur place pour les accueillir.”
Les deux directeurs adjoints se levèrent de leurs chaises et se dirigèrent vers la porte.
“C’est bon de vous savoir de retour, Zéro.” Cartwright lui fit un clin d’œil avant de sortir.
Seul dans la pièce, Reid regarda la clé argentée des menottes devant lui. Il leva ensuite les yeux vers les caméras fixées dans les angles de la pièce.
Il allait rentrer chez lui… mais quelque chose ne sentait vraiment pas bon dans cette histoire.
*
Reid se hâta de rejoindre le parking de Langley, libéré de ses menottes et de sa cellule… libéré des contraintes d’agent de terrain. Libéré de la peur des répercussions envers ceux qu’il aimait. Libéré de l’idée de se retrouver dans un trou souterrain crasseux d’E-6.
Cette idée le chiffonnait toujours, alors qu’il passait les portes pour se retrouver dans la rue. Ils auraient pu tout simplement le jeter dans un trou à Enfer Six. Ils auraient pu au moins faire peser cette menace sur lui : qu’il ne revoie jamais sa famille et soit jeté dans un trou. Mais ils ne l’avaient pas fait.
Parce que s’ils l’avaient fait, j’aurais eu toutes les raisons de parler, se dit Reid. Je n’aurais eu aucune raison de garder tout ce que je sais si j’avais pensé finir le reste de mes jours dans un trou.
Même s’il avait l’impression que ça datait d’il y a des semaines, ça ne faisait que quatre jours qu’un souvenir fragmenté lui était revenu. Avant qu’on ne lui implante le suppresseur de mémoire, Kent Steele avait réuni des informations sur une guerre préprogrammée que le gouvernement des États-Unis fomentait. Il n’en avait parlé à personne, même s’il avait révélé à Maria qu’il s’était souvenu de quelque chose qui pourrait causer de gros problèmes à pas mal de gens.
Son conseil avait été simple et direct : Tu ne peux avoir confiance en personne d’autre que toi.
Il ne l’avait pas réalisé avant, dans la cellule, avec son destin en jeu et les analgésiques qui embrouillaient son esprit. Mais il comprenait à présent. L’agence savait qu’il était au courant de quelque chose, mais elle ne savait pas exactement quoi, ni ce dont il se rappelait au juste. Lui-même ne savait pas exactement ce dont il était réellement au courant.
Il chassa cette pensée de sa tête. Maintenant que ses questions sur son avenir avaient trouvé des réponses, toute la tension accumulée venait de quitter ses épaules et il se retrouva épuisé et perclus de douleurs, tout en bouillonnant d’excitation à l’idée de revoir ses filles.
Il avait deux heures avant que l’avion des filles n’atterrisse. C’était plus que suffisant pour rentrer chez lui, prendre une douche, se changer et aller les accueillir. Mais il décida de zapper toutes ces étapes et de se rendre directement à l’aéroport.
Il n’avait pas vraiment envie de rentrer tout seul dans sa maison vide.
Aussi, il se gara sur le parking de stationnement de courte durée de Dulles et entra dans le terminal des arrivées. Il acheta un café à un comptoir et s’assit sur une chaise en plastique, buvant lentement, pendant qu’une foule de pensées tournoyait dans sa tête, aucune ne restant assez longtemps pour être considérée comme une impression consciente, mais chacune passant en flottant avant de retourner dans la boucle comme dans un tourbillon.
Il se dit qu’il fallait qu’il appelle Maria. Il avait besoin d’entendre sa voix. Elle saurait quoi dire et, même si ce n’était pas le cas, il y avait quelque chose dans le fait de lui parler qui avait toujours semblé calmer son esprit malade. Reid n’avait pas son téléphone portable mais, heureusement, on vendait des téléphones à carte prépayée dans l’aéroport, chose de plus en plus rare au vingt-et-unième siècle. Ensuite, comme il n’avait pas d’argent à mettre dans l’appareil, il composa d’abord le zéro, puis le numéro de portable qu’il connaissait par cœur.
Il n’y eut aucune réponse. La ligne sonna quatre fois avant que la boîte vocale ne prenne le relais. Il ne laissa pas de message. Il ne savait pas quoi dire.
Au bout d’un long moment, l’avion finit par arriver et une procession de passagers marchant à pas rapides s’avança le long du couloir, passant les portes et la sécurité pour tomber dans les bras de ceux qui les attendaient ou pour aller directement récupérer leurs bagages.
Strickland le vit en premier. L’Agent Todd Strickland était jeune, vingt-sept ans, avec une coupe de cheveux militaire et un cou épais. Il avait l’air à l’aise, à la fois abordable et autoritaire en même temps. Et le plus étonnant, c’était que Strickland n’avait pas du tout l’air surpris de voir Reid. La CIA avait indubitablement dû lui dire que Kent Steele avait été libéré. Il fit un léger signe de tête à l’attention de Reid en escortant les deux adolescentes le long du couloir.
Il semblait que Strickland n’avait pas dit aux filles qu’il serait là à leur arrivée et Reid lui en fut reconnaissant. Maya l’aperçut ensuite et, même si ses jambes continuèrent d’avancer, sa bouche s’ouvrit d’étonnement. Sara cligna deux fois des yeux, puis ses lèvres s’élargirent en un sourire véritablement heureux. Même avec son bras plâtré et en écharpe, celui qu’elle s’était cassé après avoir sauté d’un train en marche, elle courut vers lui. “Papa !”
Reid tomba à genoux et la serra fort dans ses bras. Maya courut derrière sa petite sœur et ils s’étreignirent tous les trois pendant un long moment.
“Comment c’est possible ?” chuchota Maya dans son oreille. On avait donné aux filles de nombreuses raisons de croire qu’elles ne reverraient pas leur père avant très longtemps.
“On en parlera plus tard,” promit Reid. Il relâcha son étreinte et se releva face à Strickland. “Merci de les avoir ramenées au pays en toute sécurité.”
Strickland acquiesça de la tête et serra la main de Reid. “Je n’ai fait que tenir ma promesse.” En Europe de l’Est, Strickland et Reid en étaient arrivés à une sorte d’étrange respect mutuel et le jeune agent lui avait promis de garder ses filles en sécurité, que Reid soit dans les parages ou pas. “Je suppose que je peux y aller maintenant,” leur dit-il. “Vous êtes toutes les deux en sécurité à présent.” Il fit un sourire aux filles, puis s’éloigna de la petite famille en marchant d’un pas tranquille.
Le trajet pour rentrer à la maison fut de courte durée, seulement une demi-heure, et Sara le rendit encore plus court par un bavardage inhabituel chez elle. Elle raconta à son père comment l’Agent Strickland s’était occupé d’elles et lui expliqua que les médecins polonais l’avaient autorisée à choisir la couleur de son plâtre. Mais elle avait préféré choisir le beige ordinaire pour pouvoir le colorier elle-même avec des feutres. Maya était restée étonnement silencieuse sur le siège passager avant, jetant de temps à autre un coup d’œil par-dessus son épaule pour regarder sa sœur cadette et lui décocher un petit sourire.
Puis, ils étaient arrivés à leur maison d’Alexandria, et c’était comme si la porte d’entrée avait aspiré toute pensée gaie ou heureuse. L’ambiance avait totalement changé. Il faut dire que la dernière fois que l’un d’entre eux avait mis les pieds dans l’entrée, il y avait un homme mort gisant juste devant la cuisine. Dave Thompson, leur voisin, était un ancien agent de la CIA à la retraite qui avait été tué par l’assassin ayant kidnappé Maya et Sara.
Personne ne dit mot, pendant que Reid refermait la porte et tapait le code pour activer le système d’alarme. Les filles semblaient même hésiter à faire un pas de plus dans la maison.
“Tout va bien,” leur dit-il à voix basse et, même s’il croyait à peine lui-même en ces mots, il passa devant pour se rendre jusqu’à la cuisine dans une tentative de leur prouver qu’il n’y avait rien à craindre. L’équipe de nettoyage de la scène de crime avait effectué un travail minutieux, mais la forte odeur d’ammoniaque et les traces blanches sur les joints des carreaux laissaient penser que quelqu’un s’était occupé d’éponger le sang et d’éliminer toute trace du meurtre qui avait été commis.
“Est-ce que quelqu’un a faim ?” demanda Reid en essayant de prendre un air décontracté. Mais les morts sortirent de sa bouche trop fort, presque théâtralement.
“Non,” dit Maya tout bas, pendant que Sara secouait la tête.
“Ok.” Le lourd silence qui s’ensuivit fut palpable, presque comme un ballon invisible gonflé à l’extrême entre eux. “Eh bien,” finit par dire Reid pour tenter de le faire éclater, “je ne sais pas pour vous deux, mais moi je suis épuisé. Je pense qu’on devrait tous aller se reposer.”
Les filles acquiescèrent. Reid embrassa Sara sur le front et elle repartit dans l’entrée, prenant bien soin de rester collée au mur, constata-t-il, même si rien ne lui barrait le passage. Puis, elle monta à l’étage.
Maya attendit sans mot dire, écoutant jusqu’à ce que les bruits de pas dans les marches atteignent la moquette à l’étage. Elle retira ses chaussures en utilisant les orteils du pied opposé, puis demanda tout à coup, “Est-ce qu’il est mort ?”
Reid cligna des yeux. “Qui ça ?”
Maya ne leva pas les yeux. “L’homme qui nous a enlevées. Celui qui a tué M. Thompson. Rais.”
“Oui,” dit Reid à voix basse.
“C’est toi qui l’as tué ?” Son regard était dur, mais pas fâché. Elle voulait la vérité, pas une autre histoire de couverture ou un autre mensonge.
“Oui,” admit-il au bout d’un long moment.
“Bien,” dit-elle dans un murmure.
“C’est lui qui t’a donné son nom ?” demanda Reid.
Maya acquiesça, puis leva les yeux pour le regarder d’un air perçant. “Il y a un autre nom qu’il voulait que je connaisse : Kent Steele.”
Reid ferma les yeux et soupira. En quelque sorte, même mort, Rais continuait de lui causer des problèmes. “J’en ai fini avec tout ça maintenant.”
“C’est promis ?” Elle leva un sourcil, espérant qu’il soit sincère.
“Oui, je te le promets.”
Maya acquiesça d’un signe de tête. Reid savait bien qu’elle reviendrait à la charge. Elle était bien trop intelligente et curieuse pour laisser les choses en suspens. Mais, pour le moment, ses réponses semblaient la satisfaire et elle se dirigea vers l’escalier.
Il détestait mentir à ses filles, et il détestait encore plus se mentir à lui-même. Il était loin d’en avoir fini avec le travail de terrain, même s’il n’était plus rémunéré, s’il voulait aller au bout de cette conspiration qu’il avait seulement commencé à découvrir. Il n’avait pas le choix. Étant donné qu’il savait quelque chose, il était en danger. Et ses filles aussi restaient en danger.
L’espace d’un instant, il aurait souhaité ne rien savoir sur l’agence ou sur le moindre complot. Il aurait juste aimé être professeur d’université et père de famille.
Mais c’est impossible. Donc, tu dois faire tout l’inverse.
Il n’avait pas besoin de moins de souvenirs. Il avait déjà essayé cette option et elle n’avait pas si bien fonctionné que ça. Il avait donc besoin de se rappeler plus. Plus il se souviendrait de choses sur ce qu’il savait deux ans auparavant, moins de travail il aurait pour découvrir la vérité. Et peut-être qu’il n’aurait plus à s’inquiéter très longtemps.
Debout dans la cuisine, à seulement quelques pas de l’endroit où Thompson avait été tué, Reid prit sa décision. Il allait ressortir la vieille lettre écrite par Alan Reidigger et relire le nom du neurologue suisse qui lui avait implanté le suppresseur de mémoire dans la tête.